Je n'étais jamais allée en Oisans, sauf un passage éclair à La Grave en remontant du sud par Briançon. La villa Keller à Livet et Gavet était pourtant une des premières photos qui m'avait marquée dans l'atlas des régions naturelles. Là, je l'ai vue en vrai tout comme la centrale des Vernes, classée monument historique. Le soleil se lève tard dans la vallée de la Romanche comme dans celle de l'Isère en Tarentaise ou dans celle de l'Arc en Maurienne. Je ne sais laquelle des trois est la plus triste et noire.
Quelques jours à Bourg d'Oisans m'ont familiarisée avec le cours de la Romanche et les paysages créés par la rivière : la montée depuis Grenoble dans cette vallée étroite et sombre puis l'arrivée dans la longue plaine de Bourg d'Oisans, plate comme la surface d'un lac entouré de sommets.
Dans la plaine de Bourg d'Oisans, c'est l'immensité plane et gorgée d'eau qui frappe, entourée de falaises abruptes. il y a partout des drains, des ruisseaux, des sources, des marais et tout est en près entourés de haies (nous n'avons qu'une seule parcelle emblavée). Ce fut autrefois un lac au bord duquel une ville s'appelait Saint- Laurent- du-lac et ses hameaux Vieille morte, la Paute. Un lac qui se vidangea dans la vallée en douceur au cours du temps ou provoqua des catastrophes au gré des éboulements qui barraient ou libéraient ses eaux ; en 1191, il engloutit la ville de St Laurent ses eaux montant brutalement et en 1219 le barrage naturel se rompt et provoque le déluge de Grenoble et 5000 victimes. Aujourd'hui, la Romanche est canalisée et deux barrages régulent le cours de ses affluents.
Au-dessus de la plaine (qui n'est qu'à 720m d'altitude), les sommets surplombants dépassent les 2000 m voire les 3000 m; on atteint les stations par des routes en lacet ou un téléphérique. Nous n'y sommes pas montés : Je venais de lire Norilsk et je commençais Lëd (le polar qu'a tiré Caryl Férey de son voyage à Norilsk, à 300 km au-dessus du cercle polaire), je vivais déjà dans la neige par -60°C et je n'avais pas besoin de plus de neige et de froid.
En revanche, nous avons parcouru la plaine et ses versants (classés zone natura 2000) à la recherche du marais de Vieille Morte (classé Espace Naturel sensible) sur un bras mort de la Romanche. C'était trop tôt dans la saison, tout était encore en habits d'hiver, la bécasse des bois n'arrive qu'en mars pour nicher et le crapaud à ventre jaune est, paraît-il, très discret. Il faudra y retourner pour voir la montagne en habits de printemps, les pommiers (dont personne ne ramasse plus les pommes) en fleurs et les restes de ce qui fut une agriculture de montagne en terrasse dans les vallées affluentes.
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