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  • Photo du rédacteurDanièle Godard-Livet

Comment mon arrière-arrière-grand-mère née en 1848 a-t-elle pu visiter l’Égypte vers 1870 ?


trois personnes à dos de chameau au pied des pyramides vers 1870
Marie Treille avec son grand chapeau, Jean Brière mon arrière arrière grand père et Claudine Treille mon arrière arrière grand mèree

Un des plaisirs du généalogiste est d’être contacté par une lointaine cousine dont vous ignorez tout et qui va vous apprendre des choses ignorées sur vos ancêtres et vous en apporter la preuve avec des photos*. C’est ce qui m’est arrivé avant-hier.


Claudine Treille mon arrière-arrière-grand-mère paternelle, son mari Jean Brière et sa sœur Marie Treille, à dos de Chameau au pied des pyramides !

Mes grands-parents étaient paysans à Vollore Montagne (à la Chevalerie), mes arrières grands-parents tout aussi paysans à Viscontat (au Grand bois), propriétaires certes, mais de terres ingrates et en altitude. Pas de quoi se payer un voyage de noces en Égypte !


Il fallait rechercher plus haut dans l’arbre généalogique pour comprendre.

Claudine Treille née en 1848 mon arrière arrière grand-mère appartenait à la famille des Treille d’Arconsat habitant les Cros. Famille de charrons et de colporteurs dont les ancêtres avaient une tradition de parsonniers : communautés « au même feu et au même lieu » fréquentes dans la montagne Thiernoise qui géraient la propriété indivise. Ces associations que Jean Anglade raconte dans « Les Bons Dieux » ont perduré jusqu’au 19e siècle. On se mariait entre cousins, les oncles épousaient les nièces et l’argent était géré par un maître élu et une maîtresse élue (qui ne pouvait être la femme du maître).


Il serait trop long de raconter* comment de génération en génération, de bons mariages en riche veuvage, d’héritage en héritage, de préférence donnée à l’aîné et aux garçons par rapport aux filles, de mort prématurée d'un frère ou d'une soeur, Claude Treille, le frère de Claudine était devenu Claude le riche.

L’état de ses possessions en 1888 sur la commune d’Arconsat occupe quatre pages de relevés cadastraux, compte une centaine de parcelles et environ une centaine d’hectares sur la commune d’Arconsat; auxquelles il faut ajouter des propriétés sur les communes de Celles sur Durolle, Chabreloche et Saint-Priest la Prugne. La légende dit « qu’il mettait un jour entier à parcourir ses terres sans en sortir ».


Sans doute est-ce Claude le riche qui a offert à sa sœur Claudine et à son beau-frère ce voyage de noces. Marie Treille la sœur encore célibataire les accompagne. Largesse envers ses deux soeurs et son beau-frère qui n'était sans doute pas totalement gratuite, ni sans arrière-pensées. Claude venait de faire un beau mariage qui lui apportait un domaine de 45ha mais il était seul,et avait bien besoin de beaux-frères pour l'aider.


Claudine Treille avait épousé en 1871 un Jean Brière, d’une famille de paysans fermiers, propriétaire d’un scitol [scierie] à la Faye commune de Noirétable, trop petit pour permettre aux trois frères Brière d’en vivre. Jean et son frère Johanny resteront, le troisième partira dit-on en Afrique du Sud.

Jean Brière et Claudine Treille viendront s’installer chez Claude aux Cros. Marie mourra en 1876 juste après son mariage avec un nouveau gendre qui ne restera pas.


Le voyage a donc lieu entre 1871 et 1875, juste après l'ouverture du canal de Suez en 1869. Ont-ils voyagé avec l’agence Thomas Cook qui avait organisé son premier voyage en Egypte en 1869 ? Ont-ils descendu le Nil dont l'agence Thomas Cook avait obtenu d'être l'agent exclusif du Sultan d'Egypte ? Sont-ils allés jusqu'à Louxor qui devient le rendez-vous de l'aristocratie d'Europe et des riches américains ?

Certes ces paysans foreziens avaient une tradition de colporteurs et l’habitude du voyage, Claude l’oncle de Claude le riche, de Marie et de Claudine n'était-il pas mort dans un hôtel de Mexico en 1865 ? Mais encore fallait-il avoir les moyens !



Marie Treille, Ludovic Paul Brière sur les genoux de sa grand -mère Françoise Bled, Jean Brière, Johanny Brière, Henriette Raillère, Claudine Brière assise devant Maria Claudia Raillère debout, Louise Raillèree

Mes ascendants directs n’ont pas poursuivi cette vocation touristique, à peine ébauchée en Égypte. Jean Brière et Claudine Treille auront deux filles qui épouseront deux frères Godard des Salles (à Coubanouze), dont mon arrière-grand-père paternel et resteront paysans*. Les liens entre les familles Brière et Treille s'estomperont au fil des générations jusqu'à disparaître.


En revanche, Johanny* le frère de Jean et beau-frère de Claudine, époux de Maria Claudia Raillière aura un fils hôtelier [Ludovic Paul Brière 1872-1945] qui ouvrira à Noirétale en 1910 l’hôtel du chemin de fer, le premier hôtel d'une longue suite d'hôtels et de pensions de famille qui fleuriront à Noirétable au début du 20 eme siècle (Tourist Hôtel, hôtel Couzon, hôtel du commerce, pensionde famille Massacrier-Sarry, hôtel de la gare. L'apogée de ce développement touristique de Noirétable sera courronnée par le classement de la ville en 1930 comme station climatique de moyenne montagne aux côtés de Hauteville et de Durtol.


Il fut un temps où cette région de Noirétable fut très touristique, mais elle n'avait que le bon air à offrir et une gare; désormais les gens vont plus loin, plus loin que l’Égypte même. Le casino lui existe toujours.


*Ce n'est pas fréquent; cela ne m'est arrivé que deux fois : la première en retrouvant ma parenté de 5eme génération avec Théodore Lévigne(1848-1912), peintre exposé au musée Dini de Villefranche et en recevant les lettres envoyées pendant la grande Guerre par Eugène Célestin Maréchal (1889-1916) à son épouse Joséphine Cattelin, là aussi parenté de 5eme génération.

*Grâce à des archives retrouvées dans le mur d'une ancienne maison par un historien local Jean François Faye, J'ai raconté l'histoire des Treille dans le livre consacré à mes ancêtres

*Il y a bien eu un Jean Marie Godard [1837-1901] grand-oncle de mon grand-père établi hôtelier à Sail-en-Couzan comme hôtelier cabaretier dans le village où un médecin avait mis en valeur une source bienfaisante, mais mon grand-père n’eut pas envie de la reprendre dit-on.

*c'est une descendante de Johanny Béatrice Chéron qui m'a confié la photo du voyage en Egypte

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