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Danièle Godard-Livet

B comme biographie


Comme je l'ai dit dans mon post précédent (A comme Arbre), rien ne me semble plus ennuyeux et plus trompeur que de regarder des arbres généalogiques, en revanche les histoires de vie me passionnent. Tous les schémas de vie sont identiques, mais dans chaque vie, les rencontres, les soutiens, les abandons, les secrets, les déplacements, les maladies, les malheurs, les traits de caractère...conduisent à une histoire tout à fait particulière.

La grande histoire aussi s'invite dans nos généalogies et bouscule des vies en profondeur alors qu'elle peut laisser indemnes leurs contemporains.

C'est cela que j'ai envie de retrouver, une cohérence d'ensemble car je pense que nos ancêtres, comme nous, avaient de bonnes raisons de faire ce qu'ils faisaient, mais les circonstances parfois ne leur en laissaient pas le loisir.

Les deux frères Godard aux destins si différentes à cause de la Grande Guerre

Au départ, deux frères très proches

Mon arrière-grand-père Johannès Marie Godard et son frère Antoine Marie Godard ont épousé deux sœurs, le même jour de 1898, le 14 mai, à la mairie des Salles (42) : Marie Elisabeth Brière et Clotilde Antonia Jeanne Brière.

Mariage sans doute arrangé par les familles pour préserver le patrimoine : les terres de Coubanouze (Les Salles 42) du côté Godard et les bois d'Arconsat (63) du côté Treille ; les deux familles n'ayant chacune que deux enfants s'étaient bien trouvées !

Antoine Marie (classe 90) avait fait son service dans un régiment de chasseurs à pied, Johannès Marie, bien que retenu par le conseil de révision (classe 92), en avait été dispensé au motif que son frère était au service.

Antoine Marie, l'aîné, et sa femme reprennent les terres de Coubanouze, pendant que Johannès Marie et son épouse, après quelques années passées au foyer des parents ( Jean Brière et Claudine Treille), se fixent au Grand Bois commune de Viscomtat (63), propriété échue à Elisabeth par sa mère Claudine Treille qui était la sœur de Claude Treille dit le riche ?

Le foyer de mon arrière-grand-père n'est sans doute pas le plus avantagé des deux car la propriété du Grand Bois est plus difficile et plus isolée que celle de Coubanouze. Mais les couples se fréquentent sans doute, du moins au début, et donnent à leurs enfants les mêmes prénoms : il y a un Jean Claudius dans chaque famille, l'un né en 1899, l'autre né en 1901.

Puis vient la Grande Guerre ! Antoine Marie a déjà six enfants vivants et n'est pas mobilisé, Johannès Marie n'en a que quatre et doit partir. Il restera au front du 20 octobre 1914 au 6 décembre 1916 puis sera détaché aux établissements Aguiraud de Noirétable qui fabriquent des caisses (de munitions ?). Au départ de son père pour la guerre, mon grand-père a tout juste quinze ans, ses frères Jérôme et Tony et sa sœur Pétronille sont plus jeunes. Pendant cinq ans, ils seront seuls avec leur mère pour s'occuper de la ferme.

Deux branches qui se connaissent à peine

Après la guerre, alors que la famille de Coubanouze, qui a maintenant huit enfants, prospère et reste très unie, la famille du Grand Bois se déchire et se perdra de vue. Mon grand-père ne s'entend pas avec son père et quitte rapidement la maison pour devenir sabotier, puis "gendre" dans une famille de Vollore-Montagne qui n'a que des filles. Son frère Jérôme reprendra la ferme du Grand Bois et gardera quelques contacts avec son frère. Mais personne n'a été capable de me parler de deux autres enfants de la fratrie, perdus de vue. Et je n'avais jamais entendu parler dans ma famille des cousins de Coubanouze (dont certains y sont toujours agriculteurs), ni des cousins de Viscomtat (qui ont tous quitté le Grand Bois mais s'y retrouvent l'été) avant d'entreprendre des recherches. Il n'y a certainement pas que la grande guerre pour expliquer des destinées aussi dissemblables pour deux frères si proches. Sans doute leurs caractères, ceux de leurs épouses, les situations matérielles différentes expliquent-elles aussi une partie de leurs biographies contrastées. Au-delà de l'histoire de ma famille, j'ai retrouvé bien des similitudes avec le récit de Stéphane Audouin-Rouzeau « Quelle histoire. Un récit de filiation 1914-2014 » qui évoque les dégâts de la grande guerre, y compris chez ceux qui ont survécu et leurs familles.

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