C’est en m’intéressant aux podcasts que j’ai découvert le rapport Brazza (à écouter gratuitement sur Spotify).
Commandé par l’État (le ministre des colonies et l'Assemblée nationale) en 1905, il n’a jamais été publié, tant il contenait une violente dénonciation des exactions de l’administration coloniale et des compagnies concessionnaires en Oubangui-Chari et au Gabon. Savorgnan de Brazza était mort à Dakar au retour de sa mission. Le rapport a été retrouvé par hasard en 1966 par une historienne au fond d’un tiroir, publié en texte en 2014, en BD en 2018, il fait l’objet d’un podcast de 5 épisodes en 2021.
L’Oubangui-Chari (actuelle République centrafricaine) constituait avec le Gabon, le Congo français et le Tchad, l’Afrique équatoriale française qui s’étendait de l’Atlantique aux monts du Darfour. Savorgnan de Brazza en était l’explorateur et le colonisateur; on le rappela de sa retraite à Alger pour lui confier la mission de 1905.
Jamais publié ! Les journalistes et en particulier les communistes l’ont demandé, réclamé, puis l’histoire a été oubliée avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale. René Maran, prix Goncourt 1921pour son roman Batouala, a de nouveau dénoncé les horreurs commises, mais on l’a lu comme un joli conte africain, excessif et injuste dans sa critique des ancêtres et des colonisateurs. Et puis, on a oublié.
Albert Londres et André Gide sont allés y voir entre 1925 et 1929 : Terre d’ébène, Voyage au Congo et Retour du Tchad. Le voyage au bout de la nuit de Louis Ferdinand Céline, prix Renaudot 1932 était bien explicite, mais c' était au Cameroun (ancienne colonie allemande), embauché par la compagnie forestière Sangha-Oubangui . Et puis on a oublié. La Seconde Guerre mondiale est arrivée.
Pourtant, on savait ce qui se passait au Congo belge depuis le début du siècle avec le roman de Joseph Conrad Au cœur des ténèbres publié en 1899 et le reportage photographique de cette jeune femme de pasteur qui montre la punition en vigueur au Congo belge où l’on coupe la main de ceux qui ne rapportent pas assez de caoutchouc. Mais c’était chez les Belges, dans le domaine personnel du roi des Belges Leopold II.
Pourtant les faits qui avaient déclenché la mission d’enquête de 1905, confiée à Savorgnan de Brazza étaient terribles : l’assassinat à la dynamite d’un prisonnier noir en l’honneur du 14 juillet ! Ils ont été rapportés dans les journaux et jugés (5 ans de prison) .Pourtant une révolte souleva l’Oubangui-Chari à partir de 1924 et fut durement réprimée en 1928-1929.
Ce rapport jamais publié fait aujourd’hui l’objet d’un podcast avec Angélique Kidjo, Lilan Thuram et si voulez une présentation plus alléchante du la mienne, regardez ici . C’est court et il ya des images.
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