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  • Photo du rédacteurDanièle Godard-Livet

Préserver l'ancien cimetière de Lissieu, témoin du 19e siècle


signature Prost sur la tranche richement décorée du monument funéraire de Stéphane Guyot de Lissieu

La mobilisation de 1993 pour le cimetière*

Il y a trente ans en 1993, lors de la destruction du mur nord de l'ancien cimetière dans le cadre de l'opération OPAC "Les Bouleaux", les Lissilois se mobilisaient sans résultat pour que des fouilles soient entreprises.

Les anciens propriétaires de Bois Dieu, domaine vendu depuis 1973, réclamaient aussi la préservation des tombes Fleurdelix et de Charrin à qui le domaine avait été acheté en 1913.


Il y avait déjà trente ans que le cimetière désaffecté depuis 1883 avait été transformé en jardin public dans les années 60, la majorité des pierres tombales, des croix et des barrières entourant les sépultures emportées et une confortable couche de terre étendue sur la surface pour pouvoir engazonner l'espace.


Pourtant, on ne se mobilisait pas pour mettre en valeur l'unique joyau de l'ancien cimetière, le monument funéraire Guyot-Durosier dû au sculpteur Pierre Marie Prost, célèbre à Lyon pour ses monuments dans les cimetières de Loyasse et de la Croix Rousse, mais pour trouver des restes plus anciens... qui n'y étaient sans doute pas ou qui avaient déjà été perdus lors de la transformation en jardin public.


Le schéma de 1876 retrouvé aux archives départementales

J'ai retrouvé aux archives départementales (côte OP22-23) un schéma qu'Amédée Chavanis alors maire de Lissieu avait joint à sa lettre au préfet pour expliquer que la plainte du sieur Planche était sans fondement. En 1876, le conseil municipal de Lissieu résistait encore (plus pour très longtemps) à l'injonction des autorités préfectorales de déplacer son cimetière.


schéma en 1876 de l'emplacement des cimetières autour de l' église, de la cure et du vieux château, et de la maison des soeurs

M. Planche se plaignait d'exhalaisons malsaines qui génaient la maison qu'il avait acquise pour sa soeur à l'entrée du cimetière.

Amédée Chavanis explique dans une longue lettre de trois pages que Monsieur Planche n'est motivé que par son intérêt personnel : en faisant déplacer le cimetière, il pourrait pratiquer des ouvertures sur le mur nord de sa maison et ainsi en accroitre sa valeur.

En outre sa plainte est sans doute motivée par le désagrément que lui a causé la demande de la municipalité de déplacer son tas de fumier entreposé sur la voie publique. Enfin, il maintient dans son jardin des lieux d'aisance qui peuvent être cause d'exhalaisons malsaines. Amédée Chavanis précise que cet état de fait est toléré car "les habitants de la campagne n'ont pas l'habitude d'avoir des lieux d'aisance dans leurs maisons".

Exceptée la désaffectation des anciens cimetières, rien n'a beaucoup changé depuis 1876 dans le coeur de Lissieu et il semble peu probable de trouver des restes très anciens dans les vignes qui bordaient en 1876 le mur nord. En revanche, le jardin de la cure recèle peut-être des trésors.

Pour les curieux, la lettre d'Amédée Chavanis, maire de Lissieu, à laquelle était joint le schéma.


Aujourd'hui, quelle préservation des tombes de l'ancien cimetière ?

Outre les pertes causées par la transformation du cimetière en jardin public dans les années 60, la démolition du mur nord de l'ancien cimetière en 1993 ne s'est pas faite sans dégats :

- la pierre tombale Magnigny-Vianay a été cassée et a disparu ;

- la pierre tombale Duchamp-Briard descellée a été entreposée sur la concession Fleurdelix-de Charrin et en a fissuré les pierres ;

- la croix de la sépulture de la soeur du St curé d'Ars s'est perdue.


Le projet actuel est de préserver les tombes qui restent, témoins du 19eme siècle de Lissieu et de ses châtelains**, comme de garder la mémoire de certains engagements du conseil municipal de l'époque.


tombes à sauvegarder (19e siècle de Lissieu)

Pour mémoire, les décisions du conseil municipal de Lissieu acceptant des donations en échange de la préservation des tombes


"l'an mille huit cent trente six et le 24 janvier avant midi le conseil municipal de la commune de Lissieu [...]

Après en avoir délibéré déclare accepter provisoirement la dite donation conformément [....] et manifester en même temps au donateur notre reconnaissance de cet acte de bienfaisance dont nous remplirons religieusement les conditions sans jamais permettre nous ni nos successeurs de changer la destination de cette propriété qui nous est concédée pour servir de presbytère à la commune.

Comme aussi consentons et permettons de laisser à perpétuité pour cession à Monsieur Durozier le terrain situé dans le cimetière de Lissieu touchant l'église dans lequel sont enterrés M. Guyot fils son beau frère et Madame Durosier son épouse, lequel terrain fermé par une barrière de fer est d'une étendue d'environ 41 centiares [...]

signé :Pierre Brisson,Pierre Murat, Pierre Napoly, Jean claude Massandre, Jean Pinet, Laurent Charité, Jean Duchamp adjoint,François Tourret maire (source : cahier des délibérations du conseil municipal de Lissieu)


L'an mille huit cent cinquante trois et le neuf octobre le conseil municipal de Lissieu est appelé à délibérer sur deux points : la donation à la commune que font Les héritiers de Charles de Charrin d'une parcelle achetée à Jean Damour pour l'agrandissement du cimetière et se réservent une parcelle pour la sépulture de leur famille à perpétuité et les plans et devis de la clôture de cette parcelle.

"sur la première question

Le conseil municipal considérant que l'agrandissement du cimetière communal est une nécessité et qu'il aurait fallu y pourvoir dans le plus bref délai ne peut qu'accepter avec reconnaissance la parcelle proposée.

Sur la seconde question, il approuve les plans et devis dressés s'élevant à la somme de six cent vingt francs.

Examinant les voies et moyens pour la commune de subvenir à la dépense des murs de clôture, le conseil municipal reconnaît que la somme exigée peut être prise sur les fonds libres de la commune, notamment sur le prix de la dernière vente faite à Monsieur Brisson d'une partie de chemin vicinal."

signé B. Thibaud, Cusin, Bail, Pinet, Duchamp, Thibaud adjoint,Léon Fleurdelix maire (source : cahier des délibérations du conseil municipal de Lissieu)


Et pour finir, ce joyau du cimetière connu depuis longtemps, mais pas apprécié à sa juste valeur


Dans son livre de la fin du 19e siècle "zig-zags autour des Monts d'or", Aimé Vintrignier parlait ainsi de la tombe de Guyot de Lissieu :


copie du texte d'Aimé Vintrignier sur Gallica/BNF
les deux faces de la superbe sépulture de Stéphane Durosier, oeuvre de Pierre Marie Prost
inscription sur la pierre tombale de Marie Louise Durosier, située derrière la tombe de son frère Stephane Guyot de Lissieu.


* J'ai déjà beaucoup écrit sur le cimetière de Lissieu, c'est qu'il y a sans doute beaucoup à dire au fil des découvertes dans les archives ou des souvenirs des Lissilois :

Si un jour j'arrive à déchiffrer les inscriptions des 6 autres pierres tombales qui sont aux côtés de celle de François Tourret sous le porche de l'église, il ne restera plus de secret dans ce cimetière et il pourra faire l'objet d'une visite dans le cadre du Printemps des cimetières.

**Il manquera toujours un autre des propriétaires de château à Lissieu au 19e siècle : Jean Baptiste Chaine (1798-1887), propriétaire du château des Calles depuis 1858, mais enterré dans le nouveau cimetière, sa mort étant postérieure au transfert du cimetière.










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